Mieux vivre

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Néophobe, adulte et en bonne santé

Pour beaucoup de parents de néophobes, l’une des plus grandes craintes est que leur enfant ne soit pas en bonne santé, ne grandisse pas comme il faut, ne puisse pas vivre comme ça tout sa vie.

Bonne nouvelle : c’est tout à fait possible. Depuis la création du blog, puis du groupe Facebook, j’ai eu la chance de discuter avec pas mal de néophobes, et même d’en rencontrer certains et de me lier d’amitié avec d’autres. Et le fait est que l’adulte néophobe est un adulte comme un autre, il fait avec sa néophobie et puis voilà.

Comme d’habitude, je vous partage principalement ma propre expérience, et j’invite les lecteurs néophobes adultes à faire de même s’ils le souhaitent, soit en commentaire sous cet article, soit par email pour que je publie un article dédié dans la rubrique « Portraits de néophobes », si vous le souhaitez.

 

 

J’ai 33 ans,et je suis, globalement, en bonne santé.

Je mesure 1m56. Je ne suis pas bien grande, mais pas non plus minuscule, je suis entourée de beaucoup de copines et collègues pas beaucoup plus grandes que moi, et qui mangent tout à fait normalement. Parmi les néophobes que j’ai pu rencontrer ou avec qui j’ai discuté, j’ai aussi vu de très grand.e.s, et des tailles plus moyennes.

Je pèse 62 kilos, jusqu’à mes 18 ans je faisais dans les 45kg, j’étais assez mince mais pas non plus trop maigre, après j’ai vécu seule et j’ai pris quelques kilos, j’ai bossé chez McDo comme job étudiant et j’ai pris quelques autres kilos, j’ai commencé à bosser et j’ai pris encore quelques kilos. Aujourd’hui, j’ai quelques kilos en trop, mais je suis en bonne forme, je fais du sport jusqu’à 2 ou 3 fois par semaine (et parfois zéro, parce que j’ai la flemme). Parmi les néophobes adultes, certains sont en sur-poids, d’autres sont trop minces et n’arrivent pas à prendre du poids par manque d’appétit, et d’autres sont dans la moyenne. Comme dans votre entourage de non-néophobes, après tout, non ?!

Je fais un ou deux rhumes par hiver, j’ai des allergies au pollen au printemps, j’ai parfois une gastro ou une rhino. J’ai un système immunitaire probablement pas aussi performant que mes collègues exemplaires qui n’ont jamais eu un arrêt maladie en dix ans, mais je n’ai jamais rien de grave non plus, et c’est toujours des petits trucs, jamais bien virulents, je suis rarement allitée plus de deux jours.

Je ne me suis jamais rien cassé, une petite fêlure au petit orteil cogné dans un coin de mur, un doigt coincé dans une porte en jouant avec mon frère, et une entorse au doigt en rattrapant mal un ballon de basket (j’ai des soucis de doigts je crois…) mais c’est tout. Pas une seule fracture en trente ans, sans être particulièrement casse-cou je suis quand même sportive et j’ai beaucoup bougé, voyagé.

La seule chose que j’ai vraiment remarqué, c’est la fatigue. J’ai besoin de beaucoup de sommeil, j’ai un sommeil qui n’est pas réparateur et je suis très souvent fatiguée. Je sais que j’ai des taux de fer assez bas, sans être anémiée pour autant. Ca joue sûrement. Mais comme je supporte mal le fer en cachet (et que a priori je n’ai pas suffisamment de vitamines pour pouvoir l’absorber correctement) je ne suis pas supplémentée en fer via des compléments alimentaires. Je me contente de dormir beaucoup, je profite de n’avoir pas encore d’enfants pour pouvoir me le permettre. 

Je fais chaque année des prises de sang pour contrôler mes carences, fer, vitamines, cholestérol, glycémie, magnésium… Je suis dans la moyenne partout. J’ai des taux un peu bas pour certains (principalement le fer), un peu élevés pour d’autres (coucou le cholestérol) mais tout est dans la moyenne, rien d’inquiétant pour les médecins. 

Ce n’est pas (encore) mon cas, mais beaucoup de néophobes de la communauté Facebook ont des enfants. Les grossesses se sont passées sans souci dans la majorité des cas (c’est une meilleure moyenne que mes copines en « bonne santé » qui mangent de tout, qui ont eu tout un tas de complications de grossesses des plus bénignes aux plus dramatiques) et les enfants sont en bonne santé. Certains sont néophobes, beaucoup mangent de tout. L’éducation alimentaire est un peu plus complexe car il faut réussir à leur faire comprendre que « maman est malade, qu’elle aimerait bien pouvoir manger de tout et qu’elle ne peut pas, qu’il faut prendre exemple sur papa et goûter à tout » mais malgré tout, beaucoup d’enfants ne présentent pas de symptômes de néophobie sévère ou de troubles de l’oralité. Et pour les autres, ils ont des parents mieux équipés, déjà bien informés, qui savent ce que traversent leurs enfants et sont plus à même de les accompagner. 

 

Le corps est une machine extraordinaire, aux pouvoirs d’adaptations assez bluffants. Oui, on peut vivre jusqu’à 70 ans en ne mangeant que des pâtes des frites et des chips. Oui, on peut avoir une vie normale malgré un régime alimentaire plus que restreint. On peut faire des études, travailler à temps plein, avoir des amis, fonder une famille. 

Non, les néophobes ne meurent pas avant 25 ans par manque de viande et de légumes, comme on peut l’entendre dans certaines des menaces, tentatives désespérées de parents ne sachant plus quoi dire pour faire manger leurs enfants néophobes. 

Et si vous ne me croyez pas, ou si vous vous dites que je suis une exception à la règle, si vous avez besoin de plus de témoignages pour vous convaincre, alors venez nous rejoindre sur le groupe Facebook, où vous pourrez lire plein de témoignages d’autres personnes elles aussi adultes, elles aussi en bonne santé

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Expliquer son trouble à son entourage

Je vous dis souvent qu’il est important d’oser en parler, de ne pas chercher à le cacher ou à éviter les situations de repas en public, oui, mais comment on l’explique justement ?
Face à l’incompréhension et l’incrédulité des gens, il n’est pas toujours facile de ne pas laisser tomber pour éviter la confrontation.
Il est pourtant primordial je trouve de pouvoir crever l’abcès au plus tôt, pour pouvoir passer à autre chose et que chacun puisse faire sa vie (et surtout le.la néophobe)
Voici donc quelques pistes pour réussir à expliquer ce que sont la néophobie et la dysoralité à son entourage, que les personnes soient proches ou moins proches.

Pour ce qui est de la phobie, ce qui m’a beaucoup aidée c’est justement de parler de phobie. De parler de quelque chose que les gens connaissent. Si un arachnophobe est face à une araignée, aussi petite et inoffensive soit-elle, il.elle se retrouve paralysé.e, il.elle a beau savoir que ce n’est pas la petite bête qui va manger la grosse, a beau savoir qu’elle.il ne risque rien, impossible de faire un mouvement, de s’approcher de la bestiole et encore moins de la toucher et/ou la tuer. Impossible de se raisonner, impossible d’être rassuré.e, c’est comme ça et c’est plus fort que tout.

Pour la néophobie alimentaire c’est pareil, c’est une phobie, une peur irrationnelle et plus forte que toute réflexion consciente, j’ai beau le vouloir, j’ai beau savoir que je ne risque rien, je ne peux pas et impossible pour moi de faire mieux. Je suis paralysée, je ne peux effectuer un mouvement vers l’aliment inconnu, le toucher est au-dessus de mes forces et le manger encore pire.

Pouvoir rapporter ça à quelque chose que les gens connaissent – de près ou de loin, tout le monde connait forcément quelqu’un qui a une phobie des araignées, des serpents, ou même un vertige incontrôlable qui laisse la personne paralysée dès qu’elle prend de la hauteur – aide vraiment les gens à comprendre et à compatir avec ce que l’on traverse.

Rappeler aussi que le vertige, les araignées ou les serpents sont des choses que l’on croise quand même relativement rarement (du moins chez nous en tout cas, je ne tiendrai probablement pas le même discours à quelqu’un qui vit dans un pays où il croise des araignées géantes tous les 4 matins !) alors que nous, on doit faire face à la nourriture au moins 3 fois par jour tous les jours de notre vie quasiment sans exception.

Dans le cadre de la dysoralité, c’est plus simple je trouve, puisque c’est un trouble aujourd’hui reconnu par une partie du secteur médical
(une petite partie, certes, mais c’est toujours mieux que rien) , qui peut le diagnostiquer et le traiter. C’est probablement très bête, mais le diagnostic d’une personne du secteur médical donne une certaine légitimité à nos difficultés face à l’alimentation.

Il y a aussi des manifestations physiques, comme le réflexe hyper-nauséeux par exemple, qui viennent appuyer que ce n’est pas juste un caprice mais qu’il y a bien au-delà du blocage psychologique des manifestations physiques de ce trouble.

Enfin, il ne faut pas hésiter à partager des articles, de ce blog, ou aussi ceux que j’ai relayés/traduits par ici, ainsi que les vidéos (mon passage dans e=m6 par exemple) ou extraits audio (le témoignage radio d’une orthophoniste à propos de la dysoralité)
Vous pouvez également partager des témoignages d’autres personnes atteintes ou aidant, qui peuvent aider votre entourage peu réceptif ou toujours sceptique à se rendre compte que ce n’est pas juste une invention ou affabulation de votre part. Il y en a quelques uns dans la section « Portraits de néophobes » sur ce blog, mais vous trouverez également pléthore de témoignages et échanges sur le groupe facebook.

Et n’oubliez pas que vous aurez toujours des gens qui ne vous croiront pas, qui resteront sceptiques malgré tout, ou qui sauront mieux que tout le monde et vous rétorqueront que s’ils étaient à votre place ils réussiraient à faire tellement mieux. Il y a des c**s partout et il faut bien composer avec…

Mais vous vous rendrez compte aussi que certains personnes que vous n’attendiez pas forcément seront bien plus compréhensives que vous ne le pensiez, et pourront vous surprendre par leur empathie et leurs conseils avisés. Vous réaliserez sûrement aussi que ce trouble est moins rare que l’on pourrait le penser (hey non, nous ne sommes pas seuls au monde !) et que beaucoup de gens connaissent quelqu’un qui ne mange pas « comme tout le monde » et qui pourrait bien être atteint de la même chose.

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Enfant néophobe à la cantine : mettre en place un PAI

Sophie Charlotte est de retour sur le blog pour nous parler du PAI. Certains ont la chance d’en bénéficier mais d’autres ne savent même pas ce que c’est, ou ne savent pas qu’ils peuvent y avoir droit pour leur enfant. Ce genre de service n’existait pas à l’époque où j’étais à l’école (ou en tout cas je n’en ai jamais rien su et mes parents non plus… j’avais juste droit à deux yaourts natures mis de côté par les dames de services pour être sûre de ne pas passer toute la journée le ventre vide), du coup je serai bien incapable de vous en parler et de vous conseiller là-dessus.

Sophie-Charlotte, maman du petit Nicho qui a bientôt 6 ans et qui est néophobe, a mis en place un PAI pour celui-ci et nous explique tout ça !

 

S’il y a bien une chose qui m’a aidée dans mon rôle de maman d’un petit souffrant de troubles de l’oralité et de l’alimentation, c’est la mise en place d’un PAI : Projet d’Accueil Individualisé. Pour celles et ceux qui n’en ont jamais entendu parler, voici la définition donnée sur le site du Service Public :

« Un projet d’accueil individualisé (PAI) est mis en place pour l’enfant ou l’adolescent atteint de maladie chronique (asthme par exemple), d’allergie et d’intolérance alimentaire. Il doit lui permettre de suivre une scolarité normale ou d’être accueilli en collectivité. L’enfant pourra ainsi bénéficier de son régime alimentaire ou de son traitement, assurer sa sécurité et compenser les inconvénients liés à son état de santé. »

 

Si une maman de la crèche, il y a 3 ans, ne m’avait pas dit qu’il était possible de mettre en place un PAI pour mon enfant du fait de ses difficultés pour s’alimenter, je n’aurais jamais pensé à y avoir recours. Je ne sais d’ailleurs pas comment j’aurais fait, ou plutôt comme mon fils aurait fait à son entrée à l’école…. Grâce au PAI, mon fils a pu faire sa rentrée sans aucune appréhension pour les jours de cantine (en dehors du fait qu’il préfère quand même manger à la maison). Je lui dépose sa nourriture dans des récipients hermétiques à son nom, à la cantine, les jours où je ne peux pas aller le chercher le midi. J’ai pris le temps d’expliquer au personnel de la cantine de quoi il « souffrait » et à ma grande surprise ils ont compris et compati !

Le PAI permet donc à mon fils de manger la nourriture qu’il sait manger sans qu’on le force à essayer des aliments qui de toute façon lui font trop peur ! Cela évite aussi de recevoir des réflexions désobligeantes qui ne feront qu’empirer les choses, du type « En fait, tu es un bébé… ».

 

La première année je n’ai eu besoin d’aucune justification médicale : j’ai exposé les faits au directeur de la maternelle et il a organisé le rendez-vous avec le médecin référent de l’école et le correspondant dans la mairie. Ce RDV permet de formaliser au sein d’un même document toutes les indications et contre-indications concernant l’enfant ainsi que les précautions à prendre en cas de situation de « crise ».

La seconde année, le médecin de l’école ayant changé, elle m’a demandé des justificatifs médicaux attestant du besoin d’un PAI pour mon fils. Comment expliquer une phobie médicalement ? me suis-je dit…. Outre le fait de prétexter une malformation qui aurait disparu avec la croissance, j’aurais été bien coincé (et mon fils aussi surtout) s’il n’avait pas été suivi par une orthophoniste et un pédopscychiatre. Ce dernier a pu me faire une lettre demandant la mise en place d’un PAI pour mon fils dans le but de préserver son équilibre alimentaire et mental (je ne saurais vous redonner sa tournure exacte). Normalement le PAI doit être renouvelé tous les ans et est aussi valable pour les activités périscolaires tels que le centre aéré.

Certaines personnes pourront penser que ce n’est qu’une autre façon de surprotéger son enfant et que c’est justement en l’exposant aux règles et aux obligations de la communauté qu’il arrivera à passer outre ses peurs. Hors dans le cas d’une phobie, ancrée depuis des années sans aucune pleine conscience de l’enfant, cela n’y changera rien. La preuve est qu’après deux ans passés en crèche à manger autour d’une table avec d’autres enfants, mon fils n’avait fait aucun progrès…

Une chose est certaine : les institutions publiques n’aiment pas la prise de risque. Dans des cas d’asthme ou d’allergies bien connues, le PAI est pour eux une évidence. Mais dans le cas de phobies sévères pouvant avoir de sérieuses conséquences vitales (ingestion forcée d’un nouvel aliment) comme les fausses-routes ou l’étouffement. En exposant le risque important que représente une alimentation aléatoire pour votre enfant et en parlant de « dysoralité » (un mot qui fait savant et auquel les orthophonistes sont aujourd’hui sensibles), l’école ne devrait pas poser de problèmes pour la mise en place d’un PAI.

Je sais que cette solution n’est que temporaire, il sera difficile pour lui, d’un point de vue social, arrivé au collège (si la situation ne s’est pas débloquée d’ici là !) de justifier d’un tel comportement. J’ai lu par ailleurs que c’est justement cette pression sociale qui peut déclencher chez l’adolescent l’envie d’essayer de nouveaux aliments pour être « comme les autres ».

En attendant, je ne peux que recommander aux parents dans le même cas de mettre en place un PAI pour le bien-être de l’enfant (sa santé et son moral) car un enfant qui a faim toute la journée ne pourra grandir et apprendre sereinement.

PS : de même quand nous allons au restaurant, nous lui ramenons toujours son repas en expliquant au serveur que notre enfant souffre d’allergies et cela n’a jamais posé de problème ! Un petit mensonge peut parfois vous simplifier la vie, pensez-y 🙂

 

Encore un grand merci à Sophie-Charlotte !

Si vous avez des questions sur le PAI, je serai bien incapable d’y répondre dans les commentaires car comme je vous l’ai dit je ne maîtrise pas du tout le sujet. Je vous invite donc vivement à rejoindre notre groupe facebook sur lequel se trouvent plusieurs parents qui ont mis cela en place pour leur enfant, et qui sauront vous renseigner bien mieux que moi !

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Ce que les parents doivent savoir

Felix Economakis, hypnothérapiste anglais spécialisé dans le traitement du SED (dont je vous ai déjà parlé plusieurs fois), nous a demandé ce que nous – les néophobes adultes – aimerions donner comme conseils aux parents pour pouvoir les aider pendant la croissance de leurs enfants. Voilà ce qu’il en est ressorti.

green and red healthy foodLe trouble de l’alimentation sélective (Selective eating disorder – SED, NDT) n’est pas la même chose qu’une personne difficile. C’est une phobie réelle et sérieuse, ou une aversion phobique.

* Être difficile est une phase normale dans le développement de la plupart des enfants. Ils PEUVENT manger les aliments mais ne veulent pas.

* Le SED est basé sur un mini-traumatisme qui a créé une aversion – l’enfant VEUT manger mais ne PEUT PAS indépendamment de la pression qu’on lui met pour le faire. En fait, l’enfant préférerait se laisser mourir de faim plutôt que de manger quelque chose qu’il ne connaît pas, donc laisser votre enfant sans manger, le menacer, le soudoyer, le faire culpabiliser, etc. ne va pas fonctionner et sera même contre-productif.

Récemment, j’ai demandé aux membre du forum Facebook « Selective eating disorder » (plus de 400 membres) quels conseils ou réponses ils auraient vraiment apprécié recevoir dès le début, qui auraient pu faire une grande différence pendant leur enfance.

Certains thèmes sont revenus plusieurs fois. Ce qui suit regroupe les réponses des membres, copiées/collées telles quelles. Parents, soyez attentifs : tout ceci vient de personnes atteintes du SED qui ont traversé ça et ont retenu ces leçons à leurs dépens. Vous pouvez épargner à votre enfant et vous-même beaucoup de frustration grâce à l’expérience des autres.

Sans ordre d’importance :

  • « Ce n’est pas votre faute (celle des parents). La plupart des professionnels de santé n’ont jamais entendu parler du SED, et tout le monde vous fera penser que vous avez fait quelque chose pour rendre votre enfant comme ça »
    J’aimerais aussi ajouter ici que vous pourriez très bien être élue « mère de l’année » et ne pas pour autant réussir à diminuer son SED, parce que la réponse phobie est par définition émotionnelle et non pas intellectuelle.
  • « Supprimez la pression ! »
    « Ne mettez pas la pression à votre enfant à propos de la nourriture! Ça fait plus de mal que de bien. Ne faites pas de la nourriture un problème, laissez-lui la possibilité de choisir (dans la limite du raisonnable) plutôt que de lui dire ce qu’il doit manger. Moins de pression = moins d’anxiété. »
    Les membres ont évoqué plusieurs fois à quel point la pression venant de leurs proches à propos de la nourriture a empiré les choses pendant leur enfance.  Les gens qui développent le SED ont tendance à être têtu, et la pression est la pire approche pour les pousser à changer.
    « Ne privez pas votre enfant de nourriture parce que votre médecin vous a dit qu’il mangerait quand il aura faim, la culpabilité que vous en tirerez vous poursuivra pour le reste de votre vie. Ne vous énervez pas contre votre enfant mais contre son trouble alimentaire. »
    « Ne vous battez pas pour les repas, cela vous fera tous deux (parent/enfant) pleurer. Ne forcez pas votre enfant à se nourrir. »
    « Prévoyez toujours sur la table quelque chose que votre enfant peut manger, en plus de la nourriture que vous, parents, aimeriez le voir manger. Laissez votre enfant manger autant qu’il le souhaite de ce que vous lui proposez. Ne vous attendez pas à des miracles instantanés. Concentrez-vous sur le fait de créer une atmosphère détendue pendant les repas et d’avoir un bon comportement à table. Votre enfant ne voudra pas goûter à de nouvelles choses, ou même ne voudra pas manger du tout, s’il se sent stressé. »
  • Tu n’es pas seul (pour l’enfant)
    Un enfant qui souffre de SED ne comprend pas sa propre réaction, et est encore moins capable de l’expliquer à ses parents. En absence d’information, un parent ou quelqu’un d’autre peut sauter à la conclusion que l’enfant est juste difficile. Pour reprendre les mots de l’un des membres :
    « J’encouragerai fortement les parents à expliquer à leurs enfant avec un SED qu’il n’est en fait pas « la personne la plus difficile du monde » et qu’il y a beaucoup d’autres personnes qui partagent le même sentiment et les mêmes peurs. Je pense que ça m’aurait aussi beaucoup aidée de rencontrer ou au moins de pouvoir échanger avec d’autres personnes qui souffrent du SED. »
  • Vous n’êtes pas seuls (pour les parents)
    « Mon conseil pour tous les parents est de s’assurer que vous recevez la bonne aide des professionnels de santé qui suivent votre enfant, et de rejoindre autant de groupes d’aide que possible traitant de ce sujet pour recevoir des conseils et de l’aide d’autres personnes qui vivent avec le SED. »
    Découvrez ce qui fonctionne grâce à ceux qui l’ont découvert en tâtonnant.
  • « Ne vous laissez pas malmener par les médecins et autres professionnels de santé mentale »
    « C’est assez difficile de trouver un professionnel de santé qui CONNAIT le SED. La plupart vont penser que c’est juste un enfant difficile normal, et que ça va passer en grandissant, ils pourront même aller jusqu’à vous conseiller de priver l’enfant de ses aliments « sûrs » jusqu’à ce qu’il cède. D’autres feront diversion en vous envoyant voir un ORL, une orthophoniste, etc. Malheureusement, vous devrez sûrement enseigner à votre médecin quelle est la réalité du SED. »
  • « Préparez vous à un long combat pour vos droits »
    Désolé, il n’y a pas de bonne manière de dire ça : vous allez être jugé(e)… Jugé(e) par les gens en qui vous avez le plus confiance au monde, les médecins, les professeurs, les chefs spirituels, les amis, et pire que tout, votre famille. Ils vont dire que vous avez baissé les bras trop tôt, vous dire que vous laissez votre enfant vous contrôler, que votre enfant est juste trop gâté. Vous allez entendre tellement de « si c’était le mien » que vous allez commencer à croire les leçons et jugements. Vous connaissez votre enfant, vous êtes le/la seul(e) à avoir connu les larmes et épreuves et la réalité du problème.
  • Respectez les difficultés de votre enfant
    « Ne servez pas dans l’assiette de votre enfant des aliments qu’il ne considère pas comme « sûrs », ne dites pas qu’il est difficile en sa présence, ne le nourrissez pas de force, ne lui mettez pas la pression, évitez tout ce qui peut empirer la situation. Si vous allez manger dehors, prévoyez d’emporter de la nourriture « sûre », ou commandez à l’avance. Plusieurs restaurants m’ont préparé un plat qui n’était pas sur le menu quand j’ai appelé à l’avance. Mangez tous ensemble à table ou alors vous en faites un problème, tout comme le fait d’en parler! »
    Votre enfant n’a pas demandé à être traumatisé par une quelconque expérience perdue dans la nuit des temps. S’il avait eu le choix à l’époque, il aurait choisi une vie plus facile, plutôt qu’une option dangereuse, bizarre socialement et qui fera de lui un adulte anxieux socialement qui devra refuser des offres d’emploi et même des relations possibles.
  • Replacez le SED dans le contexte
    Votre enfant a une phobie. Il se trouve simplement que c’est à propos de la nourriture. Vous n’en voudriez pas à votre enfant s’il avait la phobie des araignées. Vous compatiriez et réaliseriez que cela est dû à une peur causée par une grosse araignée apparue de nulle part. Votre enfant a été effrayé de la même manière par la nourriture ou quelque chose associé à la nourriture. Expliquez à votre enfant et aux autres le fait que c’est juste une phobie, que 30% de la population a des phobies sérieuses, et que celle-ci se trouve juste être à propos de la nourriture. Aider votre enfant à relativiser le SED le plus tôt possible évitera de devenir plus tard un adulte complexé, se sentant responsable, et anxieux socialement.
  • PATIENCE
    Baby steps ! Ne serait-ce qu’essayer de goûter un nouvel aliment, même si l’enfant n’aime pas, est une réussite. C’est le signe que votre enfant essaye de faire des efforts pour vaincre sa peur.

Un grand merci pour tous les contributeurs du forum SED sur Facebook. S’il-vous-plaît faites passer l’information à quiconque pourrait avoir un enfant qui souffre du SED. Cela pourrait épargner les familles d’une grande frustration inutile et douloureuse.

Enfin, sachez que de l’aide est disponible. N’abandonnez pas.

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De l’importance de savoir se débrouiller en tout circonstance

Un jour, mon père m’a dit : Avant d’avoir des enfants, t’es plein de principes. On fera ça comme ci, on ne fera pas ça, mon enfant sera comme ça. Et puis une fois que tu es parent, ton seul principe, c’est de faire comme tu peux.

Et je crois que c’est ce qu’ils ont fait, et plutôt bien d’ailleurs.
Depuis que j’ai rejoint le groupe Facebook, j’échange avec pas mal de mamans dont les enfants sont néophobes, et forcément ça me renvoie à ce que mes parents à moi ont vécu pendant toutes ces années.

Leur première préoccupation a été de savoir si j’étais en bonne santé, si je grandissais bien et si je n’avais pas de carence.

Pour ce faire, ma maman a toujours veillé à ce que je mange le plus équilibré possible, à mon échelle bien étendu. Cela passait par des yaourts, de la soupe et un peu de banane. C’était un peu mes cinq fruits et légumes par jour, même si on ne nous bassinait pas encore avec ça à l’époque.

Et puis, à côté des efforts considérables pour instaurer un menu le plus équilibré possible avec le peu d’aliments dont ils disposaient, j’étais également bien sûr suivie par le médecin de famille, qui a toujours rassuré mes parents en leur disant que tant que je grandissais bien et que j’étais en bonne santé, il n’y avait rien de trop grave, et en ajoutant qu’un enfant ne se laissera de toutes façons pas mourir de faim et qu’un jour ou l’autre, je finirai par manger de tout, quand le moment serait venu.Voyant que les efforts fournis pour me faire manger ne menaient nulle part, ma mère a adopté une autre stratégie. M’apprendre à me débrouiller seule.

Mon premier voyage sans mes parents à l’âge de six ans a été une leçon difficile, de laquelle on a pu tirer des enseignements de nos erreurs. Très confiants, mes parents m’ont laissée partir seule avec mon oncle et ma tante en Angleterre. Ils me connaissent bien, se sont souvent occupés de moi, je les connais bien aussi, il n’aurait pas dû pas y avoir de soucis. Seulement ce n’était pas juste le premier voyage sans papa-maman, c’était aussi – et surtout – le premier voyage à l’étranger. Dans un pays où même les frites ne ressemblent pas aux frites françaises et où trouver les mêmes marques qu’en France relève quasiment d’une mission impossible. Car même si je mangeais des biscuits au chocolat par exemple, je ne mangeais que telle et telle forme de telle et telle marque. Surtout pas les autres. Je n’ai presque rien mangé pendant deux jours, ils se sont rendus compte que finalement, peut être que je serais prête à me laisser mourir de faim.
young girl with suitcaseLeçon retenue, je pars désormais en voyage avec ma nourriture dans la valise. Quelques mois plus tard, je partais pour mon premier voyage de classe, et s’en suivront environ un par an jusqu’à la fin de ma scolarité. Je n’en ai pas raté un seul.
Très jeune, ma mère m’a appris à faire des pâtes : tu mets l’eau à bouillir et quand c’est chaud tu mets les pâtes le temps indiqué sur le paquet. Pas très sorcier. La première fois, je n’avais pas très bien intégré le concept de l’eau qui bout, j’ai mis les pâtes dans une casserole à peine tiède. J’ai vite remarqué qu’au bout du temps indiqué, ce n’était pas du tout cuit et que j’avais dû rater quelque chose quelque part. On apprend en se trompant, j’ai bien retenu car je m’en souviens encore alors que je n’avais pas dix ans.
Je partais toujours la valise approvisionnée en gâteaux, chips, et paquets de pâtes si le contexte le permettait.
Je suis partie trois semaines aux États Unis, je n’ai pas mangé grand chose de plus que du pain à la cantine du campus, mais j’allais à la supérette du coin m’acheter des paquets de céréales et du yaourt à boire pour compenser.Je pense que cette débrouillardise que mes parents m’ont inculqué très tôt qui m’a permis d’apprendre à mieux vivre ma néophobie. Parce qu’en sachant me nourrir seule, je pouvais contourner les situations de stress intense créés par les repas, les provisions dans ma valise, c’était ma bouée de secours, mon gilet de sauvetage.

J’ai toujours également été confrontée à des repas en société. J’ai été à la cantine de la maternelle au CM1, ma maman s’était arrangée avec la cantine pour que j’aie toujours 2 yaourts nature réservés pour moi au frigo, pour que j’ai quand même quelque chose dans le ventre même s’il n’y avait ni pâtes ni riz ni frites au menu. Jusqu’au jour où la nouvelle directrice a refusé que j’aie un traitement de faveur et m’a interdit mes yaourts, forçant ma mère à me retirer de la cantine, à contrecoeur.

Au lycée, et maintenant au travail, je m’adapte mais je ne me prive pas de moments sociaux à cause de mes blocages alimentaires. J’explique, j’en parle ouvertement, après les gens en font ce qu’ils veulent (ce n’est pas mon problème) mais au moins je ne m’empêche pas de partager ces temps d’échange avec mon entourage. Je me ramène à manger quand c’est possible, sinon je fais au mieux (pain, desserts…) et compense comme je peux sur les autres repas de la journée/semaine.

Ce sont je pense 2 aspects à vraiment ne pas négliger, qui permettent que malgré tout la place que ce trouble peut prendre dans nos vies, cela n’empiète pas sur le reste et nous permette d’avoir une vie aussi normale et épanouie que possible.