Guérison ou rééducation ?

Il y a quelques temps, une membre du groupe Facebook a posé une question un peu désespérée : « Toujours pas de traitement ou de médicament pour nous ? Je suis toujours en attente de solutions, c’est long j’ai 40 ans »
Cette question a fait son petit bonhomme de chemin dans ma tête, et m’a permis de réaliser pas mal de choses.

Il n’y a pas une petite pilule magique, un traitement par voie orale qu’on prendrait tous les matins pendant quelques temps et hop, plus rien. Pas de remède miracle comme nous l’avait promis un certain hypnothérapeute, pas de séance miracle qui nous ferait tout oublier en 50 minutes d’hypnose.

Il existe pourtant bel et bien des solutions. Pas de solutions miraculeuses, on ne se met pas à manger de tout en quelques semaines, c’est long, et c’est parfois décourageant, mais c’est bel et bien des solutions tout de même.

Des psychologues, en psychothérapie ou thérapie cognitive et comportementale, peuvent nous aider à mieux gérer notre stress et nos angoisses face aux aliments. Ils peuvent aussi nous aider à mieux accepter notre trouble, à réussir à en parler autour de nous et nous aider à vivre le plus normalement possible malgré tout, pour que ce trouble alimentaire ne se transforme pas en phobie sociale.

Des orthophonistes, formé.e.s à la prise en charge des troubles de l’oralité, peuvent nous aider à désensibiliser notre réflexe hypernauséeux, à apprivoiser de nouveaux aliments, à découvrir de nouvelles méthodes pour goûter (mettre dans la bouche directement, on sait tous que ça ne marche pas, mais il y a des tas d’autres méthodes), à identifier via le chaînage alimentaires, quels nouveaux aliments on peut tester, à partir de la liste de nos aliments copains.

D’autres néophobes, à travers leurs expériences, positives ou non, peuvent nous aider, nous orienter, nous faire découvrir de nouvelles solutions, de nouvelles recettes, nous soutenir aussi, ce qui est souvent une aide précieuse quand la plupart des personnels de santé ne connaissent même pas le trouble dont on souffre.

Mais tout ça, ça prend du temps, et surtout, ça demande une implication personnelle importante et sans relâche. Il faut que la personne néophobe veuille s’en sortir, il faut qu’elle ait envie d’évoluer (ce qui n’est pas le cas de tous les néophobes, loin de là), il lui faudra s’accrocher et se battre tous les jours pour pouvoir avancer.

Finalement, ce n’est pas tant de guérison qu’il s’agit, mais de rééducation. Une rééducation, ça demande un travail progressif, et une implication de tous les instants pour ne pas régresser. C’est long et parfois décourageant mais c’est possible si on en a la volonté. Il faut beaucoup chercher, tâtonner, et dans notre cas aussi souvent batailler, pour trouver les bonnes personnes pour se faire accompagner. Il faut une persévérance et une rigueur personnelle, car le plus gros à faire doit venir de soi-même et personne d’autre ne peut le faire à notre place. Ça n’est ni facile, ni rapide, mais les progrès qui s’enchaînent sont encourageants et donnent la force de continuer.On doit ré apprendre à manger, un peu comme quelqu’un qui devrait réapprendre à marcher après un grave accident ou une maladie. Ça prend du temps, c’est progressif, ça paraît parfois impossible et souvent très décourageant, mais on continue d’avancer, un pas après l’autre.

Quand je dis qu’il ne faut pas pousser un enfant vers la guérison à tout prix, à le trimbaler de spécialiste en spécialiste toute son enfance, c’est parce que je suis persuadée que sans cette volonté, sans cette pugnacité nécessaire pour se battre au quotidien, on n’arrive pas au bout du chemin, et personne ne peut le faire pour nous. Ni soignant, ni accompagnant. C’est parce que ce n’est pas juste une pilule qu’on peut le contraindre à avaler tous les jours. C’est de sa force vitale dont on a besoin, et ça, personne d’autre que le néophobe lui-même ne peut décider de la mobiliser.

Laisser un commentaire

1 réflexion sur “Guérison ou rééducation ?”

Retour en haut